Notre atelier de février traitera d'un
thème d'actualité : le carnaval. Cette fête a lieu le mardi
gras (21 février 2023), jour qui précède le mercredi des Cendres, le premier jour du
carême, temps de jeûne et de pénitence précédent – durant 40
jours – la fête de Pâques, commémoration de la résurrection du
Christ. Historiquement, dans le folklore populaire, le carnaval est
un moment de liesse et de transgression des valeurs sociales
établies : on se masque, on se déguise, on taquine et
plaisante gaillardement, on bois et ripaille à volonté. Histoire de
compenser les privations à venir lors du Carême.
Atelier : "Carnavals et mascarades", le 19 février 2023 de 14h30 à 17h, au Bia Bouquet, 1 place du Bia Bouquet, à Forest.
On peut rapprocher
le carnaval de fêtes antiques : les cultes dionysiaques en
Grèce ancienne, les Lupercales et Saturnales romaines, où le rôle
des esclaves et maîtres sont symboliquement renversés, et divers
festivités printanières. Le Carnaval de Binche, le plus célèbre
carnaval européen, fête le réveil de la nature au terme de
l'hiver, annonce le printemps et la nouvelle fécondité du sol, dont
les forces vitales sont réveillées par la scansion des sabots des
Gilles. De nombreux carnavals traditionnels sont connus, en Espagne,
en France (celui de Dunkerke ou de Nice), en Italie (à Vénise), en
Belgique (à Binche et dans le Borinage, mais aussi en Flandre, comme
à Alost).
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Carnaval sauvage des Marolles, photo patdx
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De nos jours d'autres fêtes carnavalesques surgissent,
même s'ils n'ont pas lieu le mardi-gras : Zinneke parade,
carnaval sauvage des Marolles, voire la Gay pride, en sont des
exemples. Aujourd'hui Par son aspect festif, coloré, et joyeusement
transgressif, le carnaval inspire les artistes.
de Brueghel au 19e siècle
De
Brueghel l'Ancien, on peut évoquer le
« combat entre Carnaval et Carême », autrement dits
entre Gras (les riches) et les Maigres (le peuple car c'est surtout
sur lui que pèsent les obligations religieuses du carême) comme
exemple. Brueghel excellait à dépeindre les jeux et fêtes
populaires de son temps, mais sa peinture évoquait aussi les temps
troublés, des guerres religieuses... Dans cette œuvre le peintre
évoque l'antagonisme de classe mettant en relief l'aspect
transgressif du carnaval. Les pauvre s'appropriant les privilèges
des riches en abolissant toute convention sociale.
Goya a aussi traité du carnaval, dans
le contexte culturel espagnol. Son tableau « l'enterrement
de la sardine » représente des villageois et villageoises
grimées dansant frénétiquement autour d'une bannière,
représentant un visage grotesque. Elle fait allusion à des
processions qui se déroulaient le vendredi saint. Initialement, dans le dessin préparatoire, la
bannière au centre du tableau portait le mot Mortus sur une
forme indéfinie, qui pourrait être une sardine.
En Espagne, la fête de Carnaval se termine par l'enterrement de la sardine. Le
rangement des déguisements dans leur coffre, la fin de la fanfare et
l'enterrement avec tous les honneurs de cet humble poisson qu’est la
sardine sont le point final de la fête pour nous préparer au Carême.
Le poisson est un
symbole du Christ, et la bannière évoquait sa mort sur la croix.
Mais ici la procession est transformée en une fête débridée. Le
sujet du tableau est en fait une – discrète - charge
anticléricale. Goya dénonçait dans d'autres œuvres plus sombres
la violence et la cruauté de l'Inquisition.
Déguisement et caricature, le thème séduit bon nombre d'artistes plus récents. Un des maîtres de la caricature française fut
Honoré Daumier. Certains de ses dessins et gravures évoquent le Carnaval.
Ici, le masque fait la nique à deux bourgeois à haut-de-forme. La charge sociale est évidente.
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masque, Musée Ensor, à Ostende, photo PatDx
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James Ensor a toujours été fasciné par les masques. Son univers pictural est une satire de la société flamande de son temps. Ensor avait un tempérament anarchiste et sa vision du monde était
radicale, sarcastique et insolente. C'est dire que le carnaval l'inspirait. On lui connait plusieurs tableaux évoquant cette fête, certains sont exposés au Musée Royal des Beaux-arts de Bruxelles. Ensor a dessiné des affiches pour le carnaval d'Ostende, il fut aussi l'un des initiateurs du célèbre bal masqué du Rat mort.
Dans sa demeure à Ostende, on peut voir quelques masques issus de son incroyable cabinet de curiosités.
Les mascarades de Ensor sont un éternel défi à la mort. Les Masques font souvent irruption dans la vie quotidienne réduit à un théâtre grotesque.
Enfin, on peut aussi citer
Toulouse-Lautrec, l'amoureux de la vie nocturne parisienne. Toulouse-Lautrec menait une vie bohème quelque peu débridée... le carnaval apparait dans certains de ses dessins et affiches. On a ici une vision moins sarcastique, mais plus mondaine, qui témoigne du côté épicurien, au sens banal du terme, de Toulouse-Lautrec.
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Carnaval, 1894 - H; de Toulouse-Lautrec
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... et de nos jours
Le surréalisme, en ouvrant les portes à l'imaginaire, ne pouvait qu'être tenté par les mascarades carnavalesques. Magritte masque ses pommes. On reste dans un onirisme sage. Mais d'autres dépeignent des personnages déstructurés.
l'artiste brésilien Cicero Dias dépeint son "carnaval surréaliste" en 1940. Cette œuvre témoigne de l'influence conjointe du surréalisme et de Picasso.
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Cicero Dias, Carnaval surréaliste, 1940
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Miro, quant à lui, brise les images pour en extraire des formes géométriques éclatées, dispersées dans un univers ludique qui lui est propre. Son Carnaval d'Arlequin (1924-1925) n'évoque cependant pas une période joyeuse pour Miro. Il a peint ce tableau dans l'extrême pauvreté et souffrait de la faim : « J'ai essayé de traduire
les hallucinations que la faim produisait. Je ne peignais pas ce que je
voyais en rêve, comme diraient aujourd'hui Breton et les siens, mais ce
que la faim produisait : une forme de transe ressemblant à ce que ressentent les orientaux » (Miro, cité dans wikipedia). Pourtant il s'agit bien d'un carnaval, mais vécu dans l'espace clos d'une chambre où les objets prennent vie, se déforment et éclatent tels un feu d'artifice.
Picasso a créé plusieurs affiches et dessin illustrant le carnaval. Sa veine reste réaliste ici, mais dans cet autre dessin, il tend vers l'abstraction.
Plus loin dans l'abstraction se situe de Sonia Delaunay, son personnage carnavalesque se réduit à une composition géométrique. |
Sonia Delaunay |
Suggestions
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Zinneke parade, Bruxelles, PatriceDx
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Gouache, pastel, crayons de couleurs, feutres ou aquarelle sont les plus appropriés pour rendre l'ambiance festive et colorée du festival. Jouez sur les attitudes des personnages, sur l'originalité des costumes et des masques, caricaturez à loisir.
La documentation photographique abonde. Visitez le site web du carnaval de Binche, de Dunkerke ou celui très caricatural (et politiquement incorrect) d'Alost... sur Flickr, faites une recherche sur le thème "carnaval" pour puiser vos idées dans une collection de plus de 300000 photos prises lors de ces fêtes. Sur pinterest, vous trouverez des exemples d'œuvres, d'artistes connus ou non, traitant du carnaval... ne les plagiez pas mais étudiez leur style, leur approche technique.
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dessin de Patrice Dx
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